Des études récentes ont montré que la mondialisation crée des entreprises gagnantes et perdantes au sein d’un même secteur. Cette colonne résume les preuves de l’Italie décrivant les différences importantes entre les entreprises nationales et les délocalisés. Les entreprises qui partent à l’étranger sont plus grandes, mais tous les modes de délocalisation ne se valent pas.
Quelles entreprises de production offshore?
Lors de l’étude de la fragmentation internationale des entreprises, il est important de bien décrire les activités commerciales concernées. Par exemple, les entreprises peuvent délocaliser les étapes du processus de production à forte intensité de services ou celles à forte intensité de main-d’œuvre. De même, ils peuvent délocaliser la production des intrants intermédiaires (délocalisation verticale) ou l’ensemble du processus conduisant à la fabrication des produits finis (délocalisation horizontale). Dans une autre chronique de Vox, Francesco Daveri et Cecilia Jona-Lasinio utilisent des données de l’industrie italienne pour montrer que la délocalisation des intrants intermédiaires est positivement corrélée à la croissance de la productivité du travail, alors que la délocalisation des services ne l’est pas.(4)
Dans notre recherche récente(5), basée sur un large échantillon représentatif d’entreprises manufacturières italiennes, nous étudions, entre autres, les caractéristiques les plus marquantes des entreprises délocalisatrices, en distinguant les dimensions verticales et horizontales de la délocalisation. Les entreprises impliquées dans la délocalisation ne représentent que 7 % de l’échantillon et représentent 12 % des ventes. Bien qu’il existe des variations considérables d’un secteur à l’autre, les entreprises appartenant à des secteurs traditionnels (tels que le textile, l’habillement et le cuir) sont plus fortement impliquées dans la délocalisation verticale et les entreprises opérant dans des secteurs de haute technologie (tels que l’équipement de bureau et les PC, et le médical, la précision , et instruments optiques) montrent une nette préférence pour les délocalisations horizontales.
Sur la base de nos recherches, les entreprises délocalisatrices s’avèrent être « meilleures » à plusieurs égards, comme résumé dans le tableau ci-dessous. Les « primes de délocalisation » globales sont clairement déterminées par les entreprises impliquées dans la délocalisation horizontale, tandis que les preuves sont plus faibles lorsque l’on examine la délocalisation verticale. Par exemple, nous constatons que la valeur ajoutée par travailleur dans les entreprises de délocalisation horizontale est en moyenne 28 % supérieure à celle des entreprises non délocalisatrices, tandis que la différence entre la délocalisation non délocalisée et la délocalisation verticale est proche de zéro. Cependant, les entreprises qui délocalisent les intrants semblent être plus grandes (en termes de ventes et d’employés) que celles qui ne délocalisent pas.
Enfin, nous nous concentrons sur une mesure plus fine de la performance des entreprises performantes, appelée productivité totale des facteurs. La productivité totale des facteurs est la part de la valeur ajoutée d’une entreprise qui ne peut être expliquée par le stock d’actifs détenus ou le nombre de travailleurs qualifiés ou non qualifiés employés. Pour cette partie de l’analyse, nous comparons la productivité des délocalisateurs d’intrants et de biens finaux à celle de producteurs purement nationaux, c’est-à-dire des entreprises qui n’exportent ni ne délocalisent. Dans l’ensemble, le nombre d’entreprises nationales représente 23 % de l’échantillon, 13 % en termes de ventes totales.
Dans la figure ci-dessous, nous dessinons des graphiques des fonctions de distribution cumulatives empiriques (estimées) de la productivité pour les trois catégories d’entreprises qui nous intéressent : plus la productivité moyenne estimée pour une catégorie particulière d’entreprises est élevée, plus le graphique correspondant est faible. de la fonction de distribution.
Le graphique montre que les entreprises purement nationales sont les moins productives. Les entreprises impliquées dans la délocalisation des intrants se situent à un niveau de productivité intermédiaire, tandis que les entreprises impliquées dans la délocalisation des biens finals sont les plus productives. Qu’est-ce qui motive ces résultats ? Ils pourraient être expliqués de deux manières différentes. La première est de considérer que la délocalisation implique nécessairement des coûts fixes (tels que trouver un partenaire étranger et/ou implanter une usine à l’étranger, fixer les détails du processus de production à l’étranger en termes d’exigences techniques et juridiques, etc.) que seuls les plus productifs les entreprises peuvent se permettre. De plus, les coûts fixes associés à l’offshoring horizontal s’avèrent plus élevés que ceux associés à l’offshoring vertical puisque des actions marketing spécifiques sont nécessaires dans le premier cas (comme la publicité, la recherche de commerciaux locaux à l’étranger, etc.). L’existence de ces coûts fixes motive alors la décision de délocalisation. La deuxième façon d’expliquer nos résultats est de postuler que les entreprises qui commencent à délocaliser à un moment donné peuvent ensuite améliorer leur efficacité en conséquence de cette stratégie. L’exposition aux opérations internationales peut en fait leur être bénéfique, de sorte qu’un processus d’apprentissage par délocalisation s’installe. Ce processus est plus fort pour les entreprises qui délocalisent les biens finals et plus faible pour les entreprises qui délocalisent les intrants.
Ces deux explications du lien entre productivité et délocalisation pourraient être pertinentes. Une évaluation rigoureuse de cette question nécessite des données avec de multiples observations des mêmes entreprises au fil du temps. C’est une question sur laquelle nous prévoyons de nous concentrer dans nos travaux futurs.
Les preuves que nous présentons dans notre étude constituent une étape dans un programme de recherche plus large qui vise à comprendre la relation entre la fragmentation internationale de la production et la performance des entreprises. Nous montrons que différents types d’entreprises font des choix d’internationalisation différents, basés sur un large menu de stratégies complexes, et qu’il existe une hétérogénéité considérable entre les entreprises domestiques et délocalisées, et entre les entreprises délocalisées elles-mêmes, selon l’étape de production qui est délocalisée. Comme souligné ci-dessus, nous pensons que cette recherche est importante pour la politique commerciale européenne. Savoir quelles entreprises sont susceptibles de gagner et lesquelles sont susceptibles de perdre des mesures protectionnistes (ou non protectionnistes) est une information importante pour le débat politique actuel.
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